La saga de l'A400M 2001-2009
Michel
Cabirol | La tribune du 30/09/2013
1: le temps du pilotage à vue
Quand l'A4000 a décollé dans le ciel bleu de Séville le 11
décembre 2009 pour son premier vol, qui durera trois heures et
quarante-cinq minutes, il y avait à la fois beaucoup de
soulagement d'avoir amené ce programme jusqu'à cette étape
importante mais aussi... beaucoup d'inquiétudes pour l'avenir de
l'appareil de la part de son maître d'œuvre EADS
et des responsables politiques invités à la cérémonie. Car le
financement des surcoûts faramineux de l'avion de transport
européen, qui faisait à cette époque travailler environ 40.000
personnes, était loin, très loin d'être réglé fin 2009.
L'A400M avait traversé depuis la signature du contrat en
décembre 2001 tant de turbulences que ce programme, le plus
emblématique de l'Europe de la défense, était déjà un rescapé :
ce vol s'est effectué avec un an et demi de retard et
d'importants dépassements de budget. Un cauchemar pour EADS et
son président exécutif, Louis Gallois. Il faut dire que fin 2009
le surcoût de l'appareil de transport militaire est évalué fin
2009 entre 7,5 et 8 milliards d'euros, contre 5 milliards pour
le gros porteur A380. « Pratiquement le chiffre d'affaires
d'Aerospatiale juste avant son intégration dans EADS »,
soufflait-on alors perfidement en interne.
Un programme sans pilote
L'A400M est un véritable fiasco industriel et politique provoqué
par de très nombreux facteurs : beaucoup d'incompétences, dont
celle de la filiale espagnole EADS CASA, sous dimensionnée pour
gérer techniquement et industriellement un programme aussi
ambitieux mais à qui pourtant la direction d'EADS a confié les
clés du programme ; des rivalités entre les dirigeants d'EADS et
d'Airbus, qui ont laissé l'A400M longtemps en complète
déshérence ; une sous-estimation de la complexité du programme.
Sans oublier un système de retour géographique de la charge de
travail qui a conduit EADS à confier des contrats à des sociétés
ne maîtrisant pas les technologies exigées. Bref, un programme
sans gouverne, ni pilote.
Fabrice Brégier, alors numéro deux d'Airbus, ne fuit pas les
responsabilités "Tout d'abord, explique-t-il fin 2009 à
La Tribune, à la signature de contrat, tous les industriels
se sont bercés d'illusions et se sont engagés sur une mission
impossible : développer un avion militaire comme un avion
commercial. Dès le départ, le référentiel était faussé. Et puis
pendant longtemps, EADS et Airbus n'ont pas géré ce programme
avec toute la rigueur nécessaire. Nous reconnaissons notre part
de responsabilité". Ce que confirmait déjà en février 2009
un rapport parlementaire : « EADS s'est engagé à réaliser un
type d'avion qu'il n'avait jamais construit sans se doter de la
meilleure organisation pour le faire ». À quoi s'ajoute une
expérience très (trop ?) limitée d'Airbus en matière
d'intégration de systèmes militaires.
Dans le groupe, on confirme qu'effectivement "il n'y a eu
personne aux commandes de l'A400M pendant très longtemps".
Après les retards de l'A380 et la valse-hésitation du lancement
de l'A350 à cette époque, EADS montre une nouvelle fois à cette
époque son incapacité à bien gérer la maîtrise d'œuvre de grands
programmes aussi bien civils et militaires. Car ce qui est vrai
pour l'A400M l'est aussi alors pour l'hélicoptère de transport
NH90 et les drones Harfang et Talarion.
EADS nie tout retard jusqu'en mars 2007
Tout s'accélère en juillet 2006. La Tribune révèle, sur la base
de témoignages de fournisseurs de l'A400M, que le programme
pourrait connaître des retards d'un an et demi à trois ans.
Pluie de démentis d'EADS et d'Airbus Military. Mais, fin
juillet, EADS lance une « revue très approfondie » du
programme, au cas où… Tout en continuant à réfuter tout
problème, et a fortiori tout retard. Les deux coprésidents du
groupe, Tom Enders et Louis Gallois, assurent que l'A400M a un
« calendrier très serré » mais « faisable ». En
octobre, le PDG d'Airbus, Christian Streiff, affirme que le
programme est « à la limite » en termes de calendrier.
Mais il lâche aussi une bombe qui passe alors relativement
inaperçue : « Nous n'avons pas encore trouvé une base de
coûts appropriée pour atteindre nos objectifs de rentabilité ».
L'A400M commence à sentir le roussi. Le feu couve mais les
alarmes ne fonctionnent pas. Ainsi, l'audit confirme bel et bien
les difficultés du programme mais EADS continue de nier tout
retard… jusqu'en mars 2007, où, du bout des lèvres, le groupe
admet « trois mois » de dérapage pour le démarrage de la chaîne
d'assemblage finale. Pourtant, Tom Enders veut encore y croire :
« Peut-être y aura-t-il des retards mais, pour l'instant,
nous collons à la date de livraison prévue en octobre 2009 »,
explique-t-il.
Un aveuglement inquiétant
Le crash est proche d'autant que les capitaines continuent de
piloter en aveugle. Pourquoi une telle cécité ? « Le
management d'EADS et d'Airbus n'avait plus de contact avec le
terrain pour comprendre la réalité d'un programme difficile,
tente-t-on d'expliquer parmi les fournisseurs. La
multiplication des intervenants a aussi entraîné la dilution des
responsabilités ».
En juillet 2007, EADS commence enfin à voir l'orage qui
s'annonce. Mais il est loin encore de l'évaluer avec toute la
finesse requise. Le groupe a surtout identifié un problème sur
le moteur et ne cache plus son irritation vis-à-vis d'EPI, le
consortium de motoristes. Pendant longtemps, EADS va s'acharner
sur ces derniers. Pourtant, c'est l'arbre qui cache la forêt.
« La livraison du premier avion au standard définitif serait
retardée de quatre ans, ce qui est le double du retard découlant
du Fadec [le logiciel du moteur, Ndlr], notait le rapport
parlementaire de février 2009. Le retard du Fadec serait sans
conséquence sur la date de la livraison au standard définitif ».
De nombreux équipements sont en retard, dont ceux d'EADS
Au-delà des moteurs, certains des programmes d'avionique confiés
à Thales, Sagem (groupe Safran) et
EADS sont très en retard, voire en souffrance. À tel point
qu'EADS demande aux clients l'abandon de deux d'entre eux que,
ironie du sort, il gère lui-même ! Fin juillet 2007, EADS
reporte de six mois le premier vol. C'est le début alors de
l'escalade des provisions (qui se montent alors à 2,4 milliards
d'euros) et d'une communication au fil de l'eau du groupe.
Lequel va subir les dérapages financiers et calendaires de
l'A400M pendant dix-huit mois.
Début 2009, tout le monde (maître d'œuvre, fournisseurs, États)
est alors au bord de l'implosion. Quelques mois plus tôt, Safran
et EADS se sont publiquement déchirés, sous les yeux médusés de
la presse, se rejetant mutuellement la responsabilité des
retards. Et EADS commence à entonner le couplet du partage du
fardeau avec les États. « Nein », répond Berlin, Paris se
montrant plus conciliant.
Hervé Morin sauve le programme
En février, le ministre français de la Défense, Hervé Morin, qui
va mouiller sa chemise tout au long de 2009, s'acharne à mettre
tout le monde autour d'une table de négociations. Notamment les
Britanniques, qui veulent filer à l'anglaise grâce à une clause
du contrat, et les Allemands, qui demandent l'application pure
et simple du texte. Tandis qu'EADS, très tactique sur le
dossier, se dit prêt à jeter l'éponge. Hervé Morin arrache en
avril un premier moratoire de trois mois aux États clients qui
restent dans le programme.
En juillet, au Castellet, dans le Var, il obtient des sept pays
clients une révision des termes du contrat, qui ouvre la voie à
une renégociation complète, tant sur les surcoûts (pénalités
comprises) que sur le calendrier et les spécifications de
l'appareil. Le programme semble une fois pour toutes sauvé.
Mais, dernier rebondissement, le gouvernement allemand sorti des
urnes en septembre 2009 reprend sa parole en s'éloignant de
l'esprit du Castellet. Il réclame l'application du contrat.
Berlin prendra-t-il le risque de faire échouer le programme ?
C'est la question qui trotte à cette époque dans toute les
têtes.
2: Le temps
de l'envol difficile du programme
C'est l'une des trop rares heures de
gloire de l'A400M, qui a collectionné tant et tant d'avatars
techniques, financiers et industriels depuis 2001, date de la
signature du contrat. Mais l'image est belle : l'arrivée de
François Hollande à bord de cet avion de transport militaire
très sophistiqué lors du salon aéronautique du Bourget en juin
dernier. A ce moment-là, tous les acteurs de cette longue saga
incroyable - industriels, politiques, militaires - espèrent
enfin que ce programme allait tirer une bonne fois pour toute un
trait sur son histoire très chaotique. D'autant que l'A400M
était proche de la date de la livraison du premier exemplaire
remis à l'armée de l'air française ce lundi. Une livraison très
attendue mais qui a été repoussée à plusieurs reprises en raison
d'aléas techniques aussi inattendus que désespérants.
Après son premier vol fin 2009 dans le
ciel de Séville, l'histoire de l'A400M ne sera pas un long
fleuve tranquille. Bien au contraire.
EADS et les pays clients ont ce jour-là un
sourire figé tant l'avenir de l'appareil est compliqué. L'avion
de transport militaire va devoir traverser encore beaucoup de
zones de turbulences. Notamment son avenir sera suspendu aux
très longues négociations à tiroir, qui n'en finissent pas sur
le refinancement du programme, qui a dérapé de plus de 11
milliards d'euros, selon un audit secret. Une facture qui a
explosé et qui paralyse complètement EADS, le maître d'œuvre du
programme. En clair, comment se partage-t-on la douloureuse ? Un
abandon de ce projet de 20 milliards d'euros aurait alors menacé
entre 10.000 et 40.000 emplois. Certains craignent même pour la
survie du groupe européen au début de 2010.
Un accord de principe
Après moins de trois mois de
négociations, le suspense autour de l'avenir de l'A400M est
levé. Les sept pays clients (Allemagne, France, Espagne,
Royaume-Uni, Belgique, Luxembourg et Turquie) trouvent début
mars « un accord de principe » à Berlin… que EADS finit
par accepter. Les Etats prennent à leur charge une partie des
surcoûts du programme européen (3,5 milliards sur les 7,6
milliards identifiés à ce jour). L'issue de ce protocole
d'accord lève les doutes sur la poursuite de l'A400M, en retard
de plus de quatre ans.
D'ailleurs, EADS considère que cet
accord fournit « une base solide pour un développement
réussi du programme ». Le groupe a quand même a dû faire un
effort. « Compte tenu de cet accord, une estimation des
revenus et des coûts incluant une évaluation des risques, revue
par le conseil d'administration d'EADS, conduit à augmenter la
provision pour perte du programme A400M de 1,8 milliard d'euros
avant impôts pour l'ensemble de l'exercice 2009 », explique
la société. Cette nouvelle charge intégrée aux comptes 2009
viendra s'ajouter aux 2,4 milliards d'euros de provisions A400M
déjà passées par l'entreprise. Soit 4,2 milliards d'euros. Le
groupe a également identifié des risques pour un montant de plus
de 3 milliards d'euros.
La France maintient sa commande à 50
appareils
A cette époque, la France, pour qui les
surcoûts du programme s'élèvent à 550 millions d'euros, compte
recevoir un premier exemplaire de l'appareil début 2013. Et le
ministre de la Défense Hervé Morin maintient la commande de
l'armée de l'air à 50 avions. Les autres Etats-clients
s'engagent quant à eux à ne pas réduire les commandes au-delà de
dix avions. En août, la Grande-Bretagne, qui a commandé 25
avions, n'en veut plus que 22. Berlin réduit quant à elle sa
commande de sept appareils en plusieurs étapes. Au niveau des
livraisons, Airbus prévoit quatre appareils en 2013, huit de
plus en 2014 et 2015, avant de passer à deux par mois en 2016.
Après cet accord, Airbus reparle enfin
de « business ». Et rêve même de placer
Outre-Atlantique son avion de transport militaire. « Les
campagnes à l'export commenceront au second semestre 2010 »,
indique mi-mars le directeur d'Airbus Military, Domingo Urena-Raso.
« Le potentiel de vente à l'export est de 500 avions au
cours des trente prochaines années, dont 200 aux Etats-Unis ; il
est hors de question qu'on n'aille pas se battre aux Etats-Unis.
On commencera une approche marketing au second semestre »,
s'enflamme-t-il.
Coup de gueule d'Airbus
Mais en mai, l'accord n'est pas toujours
pas signé. Coup de gueule d'Airbus pour finaliser le nouveau
contrat A400M entre les pays clients et EADS. Selon des sources
proches du dossier, « elles végètent et, à ce rythme-là, il
n'est pas du tout évident de signer à l'été ». C'est
pourtant ce qui est prévu depuis l'accord de principe arraché en
mars entre les États et EADS pour sauver le programme le plus
emblématique de l'Europe de la Défense. Chez Airbus, on commence
à se méfier aussi des futures contraintes budgétaires qui vont
peser sur les États clients. D'autant plus que fin août 2010, le
Royaume-Uni et l'Allemagne ont demandé un délai de deux à trois
mois avant de finaliser le contrat.
Finalement le 5 novembre, les pays
clients confirment leur accord avec EADS sur le financement du
programme sur les bases des modalités provisoires annoncées
début mars… mais ne signent pas. « Les États ont renoncé à
réclamer les indemnités à Airbus et ont accepté une hausse du
prix unitaire de l'avion de 11 millions par avion »,
explique Hervé Morin, alors que le nombre d'appareils commandés
a été réduit de dix, à 170, après la décision de l'Allemagne de
ne prendre que 53 A400M, soit sept de moins que prévu. La France
qui maintient sa commande de 50 appareils (8,4 milliards
d'euros) prendra livraison du tout premier exemplaire début
2013, puis de sept autres en 2014. Fin 2010, Airbus Military
cumulera 4 milliards de pertes.
Les mois passent... sans la
ratification du contrat
Les semaines passent, puis les mois. Pas
de ratification de l'accord par les Etats clients. Finalement,
le jeudi 7 avril 2011, les sept pays clients signent avec Airbus
Military à Séville, le fameux avenant au contrat sur le nouveau
financement de l'A400M. En outre, la certification civile sera
obtenue d'ici à la fin de l'année, estime Domingo Urena. Le
titre du géant européen est particulièrement bien orienté en
Bourse ce jour-là. La valeur qui a gagné jusqu'à 2,40 % termine
sur un gain de 0,89 %. Pour le directeur délégué d'Airbus,
Fabrice Brégier, cet accord est « l'aboutissement de
beaucoup d'efforts. Nous avons dû négocier pendant deux ans la
remise à plat du programme avec l'Occar (maître d'oeuvre
européen, ndlr) et les sept pays clients », qui paieront
130 millions par avion. Et d'estimer que « grâce à sa
remise à plat le programme A400M est techniquement cohérent. Des
motoristes aux équipementiers, y compris
Thales, tout est arrangé d'un point de vue
technique ».
Plus d'une année passe loin de
l'agitation médiatique, l'A400M semble être enfin sur les rails
même s'il rate le salon du Bourget pour un nouveau problème
technique. Mais en juin 2012, l'A400M refait parler de lui… à
nouveau en négatif : pignon cassé dans le moteur, plus
précisément dans le réducteur d'hélices, qualification militaire
difficile. Airbus ne devrait pas pouvoir livrer le premier
exemplaire de l'avion de transport militaire à la France fin
2012 comme il l'avait un temps espéré. Nouvelles inquiétudes
pour l'A400M. Et ce qui devait arriver, arriva. Fin 2012, Airbus
Military ne livrera pas le premier avion à la France. Ce ne sera
pas le cas, confirme un rapport sénatorial sur l'avion de
transport militaire, intitulé "A400M : tout simplement le
meilleur".
Un pignon cassé qui retarde la
livraison
Pourquoi un nouveau retard ? "Il
s'agissait (ndlr, cette date) d'un pilotage en interne.
Nous sommes en train de relâcher les marges", précise le
patron du programme Cédric Gautier. Ce léger retard serait
totalement anecdotique s'il n'y avait pas ce problème encore mal
cerné de pignon fragilisé par des résonances qui traîne encore.
C'est pour cette raison qu'il ne volera pas "par mesure de
précaution" au salon aéronautique de Farnborough dans la
banlieue de Londres, contrairement à ce qu'Airbus avait
programmé.
Pourtant le temps presse. Le déficit du
transport aérien est béant pour l'armée de l'air. « Nous ne
satisfaisons que 25 % à 30 % de cet exigeant contrat,
explique alors le chef de l'état-major de l'armée de l'air, le
général Paloméros. Un déficit en partie comblé par le
commandement du transport aérien européen (EATC), qui mutualise
depuis deux ans les flottes de transport de la France, de
l'Allemagne, de la Belgique et des Pays-Bas. Mais cette
structure ne dispose que de flottes vieillissantes en attendant
mieux, c'est-à-dire l'A400M , précise le général Paloméros.
Nous avons un besoin urgent de l'A400M , dont les premiers
exemplaires devraient être opérationnels dans l'armée de l'air
en 2013, rappelle-t-il.
Bras de fer entre la DGA et Airbus
En novembre 2012, la tension monte entre
la direction générale de l'armement et Airbus. C'est sur le
calendrier de livraison du premier appareil pour l'armée de
l'air française et sur le soutien des A400M que ferraillent les
deux. Le patron de la DGA, Laurent Collet-Billon, évoque même
"un petit bras de fer". Pour le patron de la DGA,
« l'industriel pense pouvoir obtenir la certification civile au
mois de janvier, puis la certification et la qualification
militaire deux mois après mais notre estimation est qu'il lui
faudra plus de temps. Nous disons à l'industriel que nous ne
pouvons pas accepter l'avion sans cette certification militaire
et sans une proposition de soutien qui soit financièrement
raisonnable. Il y a donc un petit bras de fer entre lui et nous,
mais qui se résoudra le moment venu, entre gens raisonnables.
Quant à la lacune capacitaire elle est gérée, notamment par
l'affrètement d'avions gros porteurs ».
Fin 2012 Airbus, qui prévoyait une
livraison au plus tard à la fin mars 2013, vise maintenant le
deuxième trimestre 2013. Finalement c'est début août que la DGA,
qui a réceptionné le premier exemplaire de série de l'A400M,
livre enfin le 2 août le mSN7 à l'armée de l'air. Cette dernière
recevra au total 15 A400M d'ici à la fin de la loi de
programmation militaire (LPM) en 2019 dont deux en 2013. Pour
Airbus Military, cette étape majeure marque le début d'une
nouvelle ère du transport aérien militaire en Europe et au-delà.
Car l'A400M, c'est le nouveau couteau
suisse de l'armée de l'air : avion de transport militaire à la
fois stratégique et tactique, cet appareil, qui va remplacer les
vieux Transall de l'armée de l'air entrés en service en 1967,
est sans équivalent sur le marché mondial, selon le ministère de
la Défense. Equipé de quatre turbopropulseurs, il est conçu pour
transporter jusqu'à 37 tonnes et réaliser l'ensemble des
missions liées au transport, notamment les liaisons inter et
intra-théâtre, les poser d'assaut sur terrains sommaires, l'aérolargage
de personnel (jusqu'à 116 parachutistes) et de matériel y
compris à très grande hauteur, le ravitaillement en vol (avions
de combat, gros porteurs et hélicoptères) ou les évacuations
sanitaires.
Export : 400 A400M sur 30 ans
L'avionneur compte montrer d'ici à la
fin 2013 l'A400M dans le Golfe et en Asie-Pacifique, où
l'Australie notamment a exprimé un intérêt. Le patron d'Airbus
Military, Domingo Urena, qui prévoit la vente de 400 d'A400M sur
30 ans, évaluent dans les dix années à venir, entre 50 et 100
appareils vendus sur les marchés export. Entre 30 et 40 pays
pourraient être intéressés par cet appareil , estime-t-il. Mais,
auparavant, l'avionneur doit encore développer une version
export moins sophistiquée que celle configurée OTAN, qui a par
exemple des communications cryptées par satellite.
"Cet appareil n'a pas été pensé pour
l'export, explique-t-il. Nous devons développer des
équipements pour le rendre exportable". Seule véritable
ombre, le nouveau programme brésilien d'Embraer le KC-390, bien
qu'il soit limité par sa charge d'emport (payload), pourrait lui
voler une partie du marché en entrée de gamme.
La Tribune
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* *
Enfin les essais de ravitaillement en vol d'hélicoptères
effectués en 2014/2015 ont donné des sueurs froides aux
équipages de test.
La matérialisation des turbulences de l'aile et des hélices est
bien visible
L’A400M ravitaillera-t-il un jour des hélicoptères ? Sans doute
pas, a récemment déclaré Laurent Collet Billon, délégué général
de l’armement: « On a peu de chance de parvenir à des conditions
permettant d’effectuer le ravitaillement en vol des
hélicoptères » a expliqué en substance le patron de la DGA,
l’agence chargée de la gestion des programmes d’armement en
France. Les turbulences er les remous de sillage provoqués par
les énormes hélices tournant en sens contraire sur chaque aile
rendent l'opération trop dangereuse. Toujours liées à ces
hélices, si les parachutages peuvent par exemple se faire par la
rampe arrière, l’usage des portes latérales pour les
parachutistes reste problématique. Réduire suffisamment la
vitesse et donc les turbulences impose de sortir trains et
volets comme on le voit ci-dessous.
Une caricature opérationnelle!
L'Armée
de l'Air a toujours affirmé que ces deux fonctions du cargo
militaire étaient essentielles à ses yeux. Comment les bureaux
d'étude ont-ils fait pour ne pas intégrer ces paramètres dans
leurs calculs?
Peut-être les certitudes qui ont toujours habité Airbus depuis
l'A320 que "ma concierge pouvait piloter" et qui ne nécessitait
pas de formation au décrochage pour les pilotes de ligne puisque
les Airbus ne pouvaient pas décrocher, ont joué un rôle non
négligeable. Des accidents récents ont prouvé le contraire.
En voulant innover à tout prix, c'est plus d'une usine à gaz que
d'un avion opérationnel dont ont accouché les ingénieurs
d'Airbus.
Au jour de l'accident de Séville, 12 avions ont été livrés dont
6 à la France. L'exemplaire touché par la Luftwaffe est soumis à
une forte critique puisque pas moins de 875 défauts, dont
l'absence de gaines électriques isolantes, ont été détectés.
Grave!
Dans l'avenir, Airbus compte sur l'export pour rentabiliser un
programme qui lui a déjà couté plusieurs milliard d'€. Mais quel
pays va se porter acquéreur d'un avion mal conçu au départ, mal
fabriqué et dont les capacités opérationnelles sont minimales.
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