1er juin
2007
ASSOCIATION
DE DEFENSE
DES FAMILLES DES VICTIMES
DE
LA CATASTROPHE AERIENNE DE
CHARM EL CHEIKH
Association de Défense des Familles de Victimes de
CHARM EL CHEIKH
Président : Marc Chernet – 06 07 01 79 69 –
marc.chernet@cyberex-international.com
Attachée de Presse : Caroline Dubois – 06 63 03 34
98 – caroline.dubois@wanadoo.fr
RAPPORT D’ETAPE SUR LES
CAUSES
DE LA CATASTROPHE ET SUR LA CONDUITE DE L’ENQUETE
PRESENTATION GENERALE
Le 3 janvier 2004, un avion de la Compagnie FLAH
AIRLINES, compagnie égyptienne, devant assurer un
vol Charm el Cheikh – Le Caire – Paris s’est abîmé
en Mer Rouge après quelques minutes de vol,
provoquant la mort de 148 personnes.
Trois ans après la catastrophe de CHARM EL CHEIKH,
les familles se posent toujours les mêmes questions
sur les causes de ce drame qui était évitable, bien
qu’on ait tout fait pour nous laisser penser le
contraire.
Hormis les articles de presse et les diffusions
télévisées, les familles n’auront eu à leur
disposition pour comprendre les causes de cette
tragédie, les quelques 2041 pages des trois rapports
égyptiens écrits dans un anglais éminemment
technique. Les seuls efforts qui auront été faits
pour les familles françaises sont les 9 pages en
français rédigées par le BEA !
De notre côté, nous avons énormément travaillé,
notamment à la création d’une cellule juridique qui
regroupe les avocats des familles et d’une cellule
technique, qui regroupe plusieurs parents membres de
l’Association, mais aussi des commandants de bord en
exercice et ingénieurs de l’aéronautique.
En les réunissant, je voulais qu’aucune place ne
soit laissée à la polémique ou à la subjectivité.
Nous avons alors tenté de produire un document qui
devait présenter les qualités d’un bon rapport
d’expertise : clair, complet, motivé, objectif.
La cellule technique de l’Association poursuivait
plusieurs buts :
1. Présenter aux familles sous une forme la plus
pédagogique possible et dans un langage accessible à
tous les causes et les circonstances de la
catastrophe,
2. Mettre en évidence, à l’intention du Juge
d’instruction, d’éventuelles infractions,
3.
Faciliter le travail des avocats, tant pour
les actions civiles que pour l’action pénale.
Nous considérons ce document comme une première
étape et nous poursuivrons notre travail sans
relâche.
La lecture de notre rapport, pour provisoire qu’il
soit, va laisser étonnées – j’emploie un terme
mesuré - bon nombre de personnes : vices de
conception du constructeur BOEING, absence de
respect des règles de maintenance par le
propriétaire américain de l’avion, la compagnie ILFC,
infraction à ces mêmes règles de maintenance de la
part de la Compagnie FLASH AIRLINES, infraction
encore aux règles de méthodes, de recrutement et de
formation des équipages, abandon incroyablement
rapide des fouilles en mer par décision du
gouvernement RAFFARIN, responsabilité manifeste de
l’Etat français dans l’octroi d’autorisation de
vols, enquête insuffisante de la part des égyptiens,
enquête non conclusive, pièces remontées mais non
expertisées… Ce document en rapporte plus de 400
pages !
Compte tenu des nombreuses erreurs soulevées ici et
commises par les enquêteurs égyptiens, compte tenu
de l’incroyable passivité de l’État français, plus
soucieux de compassion que d’efficacité,
l’Association va demander à l’Organisation
Internationale de l'Aviation Civile la reprise des
fouilles en mer afin de respecter l’annexe 13 du
traité et la reprise de l’enquête.
Nous demandons à l’État, dans de telles
circonstances, d’être fort et exigeant à nos côtés.
Jusque là, sur bien des aspects, cela n’a pas été le
cas.
L’Etat a concentré son action sur les aspects
humains, avec plus ou moins d’efficacité, mais il
n’est pas intervenu pour aider nos magistrats à
obtenir des éléments dans des délais raisonnables.
Il n’a rien fait pour obliger les égyptiens à
fournir une copie de l’enregistreur de sons.
Sans chercher à insister sur la responsabilité
manifeste de l’Etat dans les décisions
d’autorisation de vol accordées à cette compagnie;
au simple regard de l’enquête et de la manifestation
de la vérité, nous avons eu la volonté d’établir un
document en français qui donnera un éclairage que
nous espérons digne d’intérêt sur le drame.
Nous ne focaliserons par sur le dernier maillon du
drame, la dernière minute du vol qui reste encore un
mystère, mais sur toutes les causes : état d’esprit
de cette compagnie, fraudes à la maintenance, fraude
à la formation des équipages, fraudes aux méthodes,
absence de respect des accords bilatéraux régissant
le transport aérien entre la France et l’Egypte,
contexte mondial concurrentiel du transport aérien,
attitude des voyagistes et des organismes de
régulation des états, qui ont contribué de manière
très importante à la survenue de ce drame.
Comme les Institutions qui sont intervenues dans
cette enquête : le MCA égyptien, le National
Transportation Safety Board (équivalent du BEA
américain) et le BEA, nous avons rencontrés
d’innombrables difficultés : rappelons que dans les
jours qui ont suivi la récupération des « boîtes
noires », les fouilles en mer ont en effet été
brutalement abandonnées.
Lors de la présentation du rapport final au Caire le
25 mars 2006, Monsieur Shaker QELADA nous a affirmé
que cette décision avait été le fait des autorités
françaises, à l’époque le Gouvernement RAFFARIN. Or,
selon l’annexe 13 de la Convention Internationale de
l’Aviation Civile qui fixe les règles à respecter en
cas d’accident aérien international, il est prévu
que tout doit être fait pour reconstituer
intégralement l’appareil accidenté, y compris en
mer.
Ce texte aborde très précisément la question de la
reconstitution d’une épave en milieu sous-marin ; il
présente à cet égard des photos de robots évoluant à
3 500 mètres de fond ! On est allé repêcher les
petites cuillers en argent du Titanic à 4 500 mètres
de fond.
Cette décision surprenante était contraire au traité
et préjudiciable aux familles et à la Justice au
regard de la manifestation de la vérité. Moins de
dix pour cent des pièces ont en effet été remontés
en surface (95% pour le vol SWISSAIR SR111). La
Commission d’enquête égyptienne pourtant leader dans
la conduite des opérations ne semble pas avoir
protesté contre cette mesure. Le Gouvernement
égyptien ne disposait ni des moyens matériels ni des
moyens financiers pour mener à bien une telle
recherche.
Conséquences : qu’ils s’agissent des enquêteurs
égyptiens, des experts commis au pénal par le Juge
d’instruction ou même des experts au civil, s’il
vient à en être désigné, ces hommes de l’art ont
été, sont ou seront contraints à une approche
probabiliste des causes de la catastrophe. De ce
fait aussi, affirmer de façon péremptoire que la
catastrophe est due à telle ou telle cause ou à
telle ou telle faute, comme on l’a vu dans une
certaine presse sous une certaine signature, relève
de l’outrecuidance.
D’ailleurs, à la question posée de savoir si
l’absence des pièces de l’avion avait constitué un
facteur d’ignorance sur les causes réelles de la
catastrophe, Monsieur Shaker QELADA a répondu, non
sans une logique pleine d’humour, qu’il n’en savait
rien puisque justement il n’avait pas vu les pièces.
La méthodologie : celle officiellement utilisée par
les enquêteurs égyptiens a consisté à déterminer des
hypothèses et à considérer chaque hypothèse comme
possible jusqu’à démonstration qu’elle ne l’était
pas. Les enquêteurs égyptiens ont arbitrairement
imaginé une cinquantaine de scénarii et ont commencé
à éliminer ceux qu’on pouvait démontrer comme
contraires aux données factuelles recueillies. Les
scenarii restants ont été automatiquement considérés
comme possibles. Or, en logique scientifique et
mathématique le fait de ne pas pouvoir démontrer
qu’une affirmation est fausse ne signifie pas que
celle-ci est vraie. Il existe de nombreuses
affirmations fausses dont on n’a pas les moyens de
démontrer qu’elles le sont. Elles ne deviennent pas
des vérités pour autant.
En raison de l’abandon prématuré des recherches en
mer, la méthodologie repose nécessairement sur des
hypothèses qu’il convient ensuite de valider ou
d’invalider en les confrontant avec les données
factuelles disponibles et les simulations sur
ordinateur. Nous verrons ainsi comment l’hypothèse
de la désorientation spatiale simultanée des deux
pilotes est à écarter en appliquant strictement
cette méthode.
…/…(détails
techniques se référant au rapport complet)
LES CONCLUSIONS
1 En
raison de ses nombreux manquements, l’enquête est à
refaire, les fouilles à reprendre.
2 La
DGAC ne fait pas son travail : elle délivre des
autorisations de vol en contravention avec les
règles et/ou pire sans intelligence, sans métier, de
façon administrative dans un monde qui ne l’est pas.
On le voit dans l’affaire CHARM EL CHEIKH, on l’a vu
dans le crash de la WEST CARRIBEAN, on le reverra si
rien n’est fait. Le signal
envoyé par la Suisse et la Pologne interdisant pour
des raisons solides tout survol et toute escale à
cette Compagnie n'a pas été pris en compte.
3 Les
Associations ne peuvent pas jouer pleinement leur
rôle : au-delà des contacts diplomatiques, des
témoignages de compassion et de la gestion des
aspects humains, très difficiles, elles n’existent
pas pour les enquêteurs étrangers, elles n’existent
pas pour les enquêteurs techniques français, elles
n’existent pas sur le plan judiciaire international,
elles ne font pas partie des commissions d’enquête
auprès desquelles elles ne sont pas représentées et
doivent passer par des avocats pour demander aux
magistrats d’exécuter des actes d’instruction
internationaux dont l’issue est longue et
incertaine.
4 La
cause précise de la catastrophe de CHARM EL CHEIKH
n’est pas connue, mais elle réside dans des
dysfonctionnements multiples de l’avion tant en
électronique qu’en hydraulique, voire des anomalies
structurelles liées à l’accident antérieur de l’aile
droite non cité dans le rapport. La mauvaise
conception des capteurs existant, les économies
réalisées, qui se traduisent par l’absence de
capteurs cruciaux tel le capteur d'effort sur les
commandes de vol ou le capteur de position du trim
d'aileron, l'absence totale d'entretien ou de
calibration des capteurs existants nous prive de la
connaissance des circonstances précises.
5 On
peut résolument écarter la thèse de la
désorientation spatiale du commandant de bord et du
copilote. En revanche, on ne saurait exclure une
échappée de la part du pilote (c'est-à-dire une
imprécision de pilotage), comme cela a été observé
avec une prise d'assiette excessive avant la mise en
virage à droite, échappée qui a pu contribuer à la
mise en position inusuelle.
L'inexpérience de l'équipage sur le B737 est à
souligner sans qu’il soit toutefois possible mettre
en évidence un lien de cause à effet entre ce manque
d’expérience et la catastrophe.
6 Le
BOEING 737 présente de nombreux vices de conception,
notamment en matière de système d’information, de
conception des hydrauliques et en raison de la
présence de plusieurs systèmes fermés
susceptibles de fonctionner en boucle et de bloquer
les interventions de l’équipage. Il ne s’agit pas de
vices résultant de l’âge du modèle mais bien de
dispositifs absents ou mal conçus alors que les
connaissances techniques de l’époque auraient du
pousser le fabricant à les adopter ou à les modifier
en vue d’une meilleure sécurité.
7 La
Compagnie FLASH AIRLINES fraudait par absence de
respect des règles de maintenance, de recrutement de
composition et de formation des équipages.
8 le
Ministère de l’Aviation civile égyptien ne fait pas
son travail ; il délivre ou délivrait des
autorisations d’exploitation à une compagnie qui
n’entrait manifestement pas dans les normes.
9 Il
faudra éclaircir par écrit la question de savoir qui
a décidé l’arrêt des fouilles en mer fin janvier
2004.
10 la
Compagnie américaine ILFC a laissé voler un appareil
qui avait déjà été fortement endommagé ; elle n’a
pas respecté ses obligations de maintenance.
11
«L’économique» est omniprésent dans cette affaire :
économie sur la maintenance tant par le propriétaire
que par l’exploitant, économie sur les équipements
de la part du constructeur, économie dans la
conduite de l’enquête : pas de vol d’essai, pas de
récupération des pièces, pas d’analyse spectrale de
l’enregistreur de sons, choix de ces compagnies low
cost par les voyagistes français.
LES EXPERTS DE LA CELLULE TECHNIQUE
Monsieur Amine MECIFI,
Diplômé de l’ENAC, de nationalité algérienne,
arabophone, qui n’a pas compté son temps et est
intervenu bénévolement lors de nombreuses réunions,
par la voie d’innombrables courriers électroniques,
par son déplacement en Egypte en mai 2004. Amine
MECIFI est passionné d’aviation, spécialisé en
accidentologie aérienne domaine dans lequel il a
publié un premier ouvrage, un deuxième étant en
préparation.
Monsieur Jean-Marie BLOT,
Ingénieur, ancien cadre et ingénieur d'essais en vol
du Centre d’Essai en Vol de BRETIGNY, spécialiste du
dépouillement des enregistreurs de vol. Jean-Marie
BLOT nous a accueillis à son domicile lors de séance
de confrontation et de rédaction. Il a apporté un
concours précieux à la compréhension du vol, à
l’établissement des courbes et à leur
interprétation.
Monsieur Alain Le CARROUR,
Commandant de bord Air France, Secrétaire du CHSCT
(Comité Hygiène, Sécurité et Conditions de Travail).
Alain a étudié cette catastrophe notamment sous
l’angle de l’absence de respect des normes de
sécurité, au niveau de la Compagnie, de la formation
et de la composition des équipages. Il a mis en
évidence des manquements importants à la sécurité au
niveau même de la conception du B 737 au regard des
règles de l’art actuelles.
Monsieur Jacques CESAR,
Ancien pilote de transport militaire, pilote de
ligne, a contribué en formulant de nombreuses
observations et en participant à nos réunions.
Monsieur Bernard RUFF,
Expert comptable, ancien pilote d’avion de chasse et
officier pilote enquêteur a contribué de la même
manière.
Monsieur Joël Le JEANNIC,
Technicien avionique, Délégué Syndical CGT Air
France Industries.
Monsieur Antoine HAYEM,
Commandant de bord, membres du Syndicat National des
Pilotes de Lignes.
Monsieur Thierry Le FLOCH,
Commandant de bord, membres du Syndicat National des
Pilotes de Lignes.
Enfin, des membres parents de l’Association tous
durement éprouvés par cette catastrophe :
Monsieur Daniel VIALET,
Ingénieur électronicien,
Monsieur Christian VIALET,
Monsieur Patrick CHALONS,
Monsieur Philippe MANSON,
Responsable de la revue de Presse.
Qu’ils soient tous infiniment remerciés ici.
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